On connaît les talents
de conteur de Barjavel. Il les met ici au service de la légende arthurienne,
de sa légende arthurienne, faite de compilation et d'imagination. Les
principaux personnages sont là : Merlin bien sûr, et la douce fée
Viviane, la dame du Lac qui veille sur Lancelot comme sur son propre fils ;
Morgane la maléfique et Guenièvre l'amoureuse ; Gauvain, Keu,
Perceval et le pur Galaad
On reste cependant sceptique devant quelques oublis et anachronismes (humoristiques
sans doute, mais tout de même
) : Lancelot, le célèbre
chevalier à la charrette, ne monte pas dans la charrette, car il ne la
croise pas, la reine Guenièvre n'ayant pas été enlevée
il est retenu prisonnier par la lubrique Morgane (dont le château n'est
rien moins qu'un lupanar) et ne revient que pour tuer Arthur et arracher la
reine au bûcher. Pendant ce temps, la vieille Bénigne mange des
boîtes de conserve de cassoulet et de couscous fournies par Merlin
Tout cela est inutile et bien dommage, même si le roman de Barjavel fait
la part belle aux histoires d'amour (Merlin - Viviane, Lancelot - Guenièvre,
Perceval - Bénie) plus romantiques que médiévales. On déplore
l'absence quasi totale du merveilleux Mordret et l'inanité des scènes
de combat. Bref, une compilation arthurienne plutôt ratée
L'enchanteur, René Barjavel, Gallimard (Folio n°1841), 2002, 470 pages (éd. originale : Denoël, 1984)